Le statut d’intermittent du spectacle : L’essentiel à connaître (1/2)
Le statut d’intermittent du spectacle, ça te parle ? Peut-être que comme beaucoup, tu le connais, mais sans réellement savoir ce qui se cache derrière…
Dans cet article en deux parties, je te propose de faire un tour d’horizon de ce statut bien mystérieux. Pas à la manière d’un simple exposé Pôle Emploi (oups, France Travail), mais avec ma vision “interne”. Puisque je suis intermittent moi-même. Je te parle donc du pourquoi et du comment du statut d’intermittent du spectacle. En passant par la manière d’y accéder ainsi que ses avantages et inconvénients.
Le statut d’intermittent du spectacle, qu’est-ce que c’est ?
Le terme de “statut” pour parler de l’intermittence n’est pas tout à fait exact. C’est un abus de langage. Il s’agit en réalité d’un régime d’allocations chômage différent du régime général. Il te permet de bénéficier d’indemnités lorsque tu n’es pas sous contrat de travail. De cette manière, tu peux cumuler salaires et chômage, et cela, sur un même mois.
Concrètement, lorsque tu travailles comme intermittent, tu disposes d’un statut de salarié au même titre que n’importe quel employé. D’ailleurs, l’intermittence du spectacle se rapprocher du système d’intérim. Car en tant qu’intermittent, tu alternes très régulièrement des périodes salariées et de chômage. Tout en ayant plusieurs employeurs.
Quelle est l’importance de l’intermittence pour le secteur culturel ?
Le milieu culturel regroupe un grand nombre de métiers très variés. Mais les productions n’ont pas la possibilité d’embaucher à plein temps toute la main d’œuvre qui leur est nécessaire aux productions. En effet, les besoins sont souvent établis sur de courtes périodes très intenses. Pour faire simple, le milieu fonctionne par pic, avec des besoins humains irréguliers.
Ce sont ces fluctuations qui ont donné le jour à l’intermittence comme nous la connaissons aujourd’hui.
Ce système à trois avantages :
- Il permet à la main-d’œuvre de survivre en dehors des périodes d’embauche
- Il la garde disponible et souple
- Et lui évite de retourner en entreprise, à la recherche d’une situation plus stable
Les annexes du spectacle
Il existe deux annexes chez “France Travail” qui concernent les intermittents. Celles-ci contiennent des règles administratives pour la gestion du statut. Il s’agit de l’annexe 8 et l’annexe 10.
La différence entre les deux est très simple :
- L’annexe 8 est dédiée aux artistes. Ils reçoivent principalement une rémunération au cachet. Un cachet étant équivalent à 12 heures de travail. Cela permet de valoriser les temps de répétition et de préparations nécessaires. Même s’ils ne passent que quelques heures sur scène à chaque représentation.
- L’annexe 10 est destinée aux techniciens. Pour eux, tous les temps de travail sont comptés à l’heure. Tu t’en doutes, il s’agit des heures déclarées. Ce qui peut bien souvent différer des heures réellement effectuées…
Le type de contrat d’embauche qui est réalisé est unique : il s’agit de CDDU (contrat à durée déterminée d’usage).
Ces contrats sont semblables au CDD classique, mais tu ne les trouveras que dans le spectacle. Leur durée peut être très variable. Tu peux donc te retrouver aussi bien avec des contrats de 4h sur une soirée. Qu’avec un contrat de 200h étalées sur plusieurs mois.
Outre cette méthode de calcul d’heures, il existe plusieurs différences entre les deux annexes. Notamment sur leurs valorisations des indemnités chômage. Elles sont légèrement plus avantageuses pour les artistes.
Il est aussi tout à fait possible de cumuler les deux annexes pour devenir intermittent. Simplement, les règles de calcul utilisées seront celles où tu auras effectué le plus d’heures au moment de déposer ton statut.
Comment bénéficier du statut d’intermittent du spectacle ?
Pour devenir intermittent, sur le papier, ce n’est pas sorcier. Il faut que tu justifies de 507h de travail dans le spectacle (cachet et/ou heures techniques), le tout sur une période de 12 mois maximum.
Et il n’y a que deux obligations administratives pour établir un contrat d’intermittence :
- Disposer d’un numéro congés spectacle. Mais lors de ton premier contrat, celui-ci est créé automatiquement.
- Être à jour de ta visite médicale. Tu peux tout de même l’effectuer après tes premiers contrats, mais ne traine pas trop !
Évidemment, il existe de nombreuses petites règles à surveiller si tu cumules d’autres activités à côté. Mais cela est loin d’être incompatible. Pour les cas particuliers, le mieux reste d’en référer à France Travail… J’écrirai peut-être un article sur les questions les plus régulières à l’occasion.
Le plus dur reste de trouver ces heures. Car ce n’est pas toujours facile de trouver des employeurs capables de déclarer des heures en intermittence quand on commence.
Dans quel secteur faut-il travailler ?
Pourtant, une entreprise, une association ou même un particulier peut embaucher un intermittent sous certaines conditions.
Pour commencer, le plus simple reste souvent, en tout cas pour la technique, d’aller contacter les salles et entreprises d’événementiel de ton secteur. Ces structures disposent toutes d’une licence d’entrepreneurs du spectacle. Elles sont donc habilitées à t’embaucher en tant qu’intermittent.
Mais si un particulier, une association ou une société n’ayant pas cette licence souhaite organiser elle-même un événement, c’est possible.
Il faudra alors passer par le GUSO (Guichet Unique du Spectacle Occasionnel) pour établir les contrats. Cet organisme permet à n’importe qui d’embaucher des artistes et techniciens en garantissant que les heures payées valorisent correctement leurs droits.
En dehors de ces deux méthodes, aucun type de contrat ne peut être reconnu comme du travail intermittent. Vérifie donc bien les (bonnes) pratiques de chaque nouvel employeur que tu rencontres. Certains sont peu scrupuleux et peuvent te pousser à créer une auto-entreprise afin de leur générer des factures. Mais cela ne sera jamais comptabilisé pour ton statut. Pire, établir une auto-entreprise dans le spectacle pourrait te faire radier des allocations.
Les droits et avantages du statut d’intermittent du spectacle
Maintenant, tu dois te demander comment marche cette histoire de droit à l’intermittence ? C’est ce que je vais te montrer ici, ainsi que les avantages de ce statut.
Les allocations d’intermittence
Une fois ton statut d’intermittent validé par France Travail, il est valable pour une période de 12 mois. Durant cette année, tu devras déclarer tes jours de travail chaque mois. Pour ces jours de travail, tu recevras le salaire de tes employeurs, tandis que le reste du mois sera compensé par tes allocations.
La validation de l’intermittence est accompagnée d’une ARE (Allocation de retour à l’emploi). Aussi appelé AJ (allocation journalière). Il s’agit du taux net auquel tu seras indemnisé pour chaque jour non travaillé.
France Travail calcule celle-ci en fonction du total d’heures et des salaires bruts que tu as validés avec ce statut. Donc, chaque année, elle est renouvelée et ajustée en fonction du travail que tu as effectué.
Lors de ton actualisation mensuelle, plusieurs calculs et règles s’appliquent. Tu n’as pas à les connaître pour l’actualiser. Mais si tu souhaites comprendre comment France travail s’occupe de toi, il est intéressant de se pencher dessus.
Par exemple, un mois type de techniciens peut ressembler à cela :
(Un mois de 30 jours, sans franchise ou carence, et avec une AJ de 60 € net/J)
déclaration :
- du 1 au 2 : travail de 16 h pour 400 € (brut)
- du 10 au 12 : travail de 34 h pour 600 € (brut)
- du 15 au 20 : travail de 50 h pour 750 € (brut)
On obtient 100 h dans le mois, qui vont être convertis en journées de 8h. soit 12.5 jours.
Un coefficient de 1.4 est appliqué, ce qui nous amène à 17.5 jours. Pourquoi ce coefficient ? Parce que c’est comme ça !
Pour 100h effectuées, France Travail considère donc que tu as 17 jours “travaillé”. Cela même si tu as effectué ces heures sur plus ou moins de jours, 10 en réalité dans cette situation.
Tes allocations paieront donc les 13 derniers jours du mois. Soit 60×13 = 780 €.
Au final, tu auras donc reçu 1750 € de salaire brut, soit environ 1350 € net, plus 780 € d’allocations. Soit un total de 2130 € net de salaires à la fin du mois.
La protection sociale
Contrairement à ce que beaucoup pensent, les intermittents ne sont pas démunis face à la santé.
En tant que travailleur salarié, tu es affilié à la caisse d’assurance maladie de ton lieu de résidence et tu relèves du régime général de la sécurité sociale.
Bien évidemment, il est plus prudent de compléter cela d’une mutuelle. De nombreux intermittents choisissent généralement Audiens, car elle leur propose des tarifs avantageux.
Mais je te conseille tout de même de faire jouer la concurrence si ta famille ou ton/ta partenaire a accès à de meilleures mutuelles.
Par exemple, pour mon cas, ma femme est enseignante. Elle a accès de son côté a des mutuelles encore plus avantageuse dont j’ai pu profiter également !
Les droits de formations
Être intermittent te donne également accès à des droits de formations non négligeables. Je ne te parle pas ici du CPF et autres droits classiques, mais bien de droits spécifiques aux intermittents.
Au bout de deux années d’intermittences consécutives, tu ouvres des droits de formations auprès l’AFDAS. Ces droits de formations sont très intéressants, car ils te permettent de rester constamment à jour des avancées techniques de nos métiers.
Ces droits sont répartis en deux catégories :
- Les formations de développement de compétence, qui entraînent une carence. La carence étant une période pendant laquelle tu ne peux plus effectuer de nouvelles demandes de formation.
Si ta formation dure 40h ou moins, la carence sera de 6 mois. Si elle dure plus de 40h, la carence sera de 12 mois.
- Les formations de sécurité, qui n’entraînent aucune carence, mais avec un plafond de 3300 euros a l’année.
Tu peux retrouver la deuxième partie de l’article ici ! Je continue en te parlant des obligations et désavantages du statut d’intermittent. Ainsi que des spécificités du régime comme les congés ou la retraite.